mardi 24 juillet 2018

si ce n'était parfois le coeur glacé des hommes (2)


pour la vieille chapelle abandonnée, pour l'envol des clochettes, pour la brise légère qui s’engouffre et sèche vos vêtements, pour une griserie qui vous saisit,

si ce n'était parfois le cœur glacé des hommes

pour la grand-mère qui s'affole, le temps de se retourner et le petit a filé droit dans les vagues, pour la femme aux cheveux gris,  des boucles légères plaquées sur ses tempes, tôt encore, ventre lourd en avant, le nombril pointe, précautionneuse, elle marche, pour le gros homme appuyé sur une béquille, les vagues caressent ses chevilles, progression improbable au bord de la rupture mais il est là, vaillant, avance, aller retour,

 si ce n'était parfois le cœur glacé des hommes

pour l'homme qui passe à votre hauteur, ce qu'il est velu, son regard vous effleure, il se détourne, robe à pois, chapeau orange, jeune côté pile, votre âge côté face, pourquoi s'attarderait-il, pour tous ces corps offerts, vigoureux, élancés, ou vieillissants, la plage arpentée dans un sens dans l'autre, une hâte, une lutte, une nonchalance, qu'importe, vivants, tous

si ce n'était parfois le cœur glacé des hommes

mercredi 18 juillet 2018

si ce n'était parfois le coeur glacé des hommes (1)

pour un matin clair, pour un sentier entre ombre et lumière, pour l'océan en contrebas, pour le vin blanc qui pétille, le txakoli et pour plus que tout, l'oiseau qui s'obstine

si ce n'était parfois le cœur glacé des hommes

samedi 14 juillet 2018

De moment en moment René Char, poème d'ouverture à La Postérité du Soleil d'Albert Camus

– Poème d'ouverture de René Char  à La Postérité du soleil (1965) d’Albert Camus 
voir ici



 De moment en moment

Pourquoi ce chemin plutôt que cet autre ? Où mène-t-il pour nous solliciter si fort ? Quels arbres et quels amis sont vivants derrière l’horizon de ses pierres, dans le lointain miracle de la chaleur ? Nous sommes venus jusqu’ici car là où nous étions ce n’était plus possible. On nous tourmentait et on allait nous asservir. Le monde, de nos jours, est hostile aux Transparents. Une fois de plus il a fallu partir… Et ce chemin, qui ressemblait à un long squelette, nous a conduits à un pays qui n’avait que son souffle pour escalader l’avenir. Comment montrer, sans les trahir, les choses simples dessinées entre le crépuscule et le ciel ? Par la vertu de la vie obstinée, dans la boucle du Temps artiste, entre la mort et la beauté.