dimanche 30 octobre 2011

mardi 30 octobre 1939 Notre journal (4)

Il porte, attachée autour du cou une grande clochette. Son chien se tient à côté de lui. Lorsque les corbeaux se posent, Jean court, la clochette s'agite, le chien aboie et les corbeaux effrayés s'envolent dans le ciel en croassant.

mercredi 26 octobre 2011

Bon appétit ! (2)

des heures à la traquer par les taillis, sous-bois et futaies,
entre petits ou gros mensonges,
 récits à n'en plus finir,
même les taiseux sont de la partie,
c'est qu'elle résiste, se cache et le plus souvent s'échappe,
respect avec lequel ils l'évoquent,

mais une certitude, 
pas de chasseur de bécasses sans son chien,
et un jour c'est dimanche,
et un jour c'est fête,
on en sort quelques-unes du congélo,
à table ! 

mardi 25 octobre 2011

jardin d'enfants

un banc au soleil,
bientôt leurs cris et leurs rires,
le vieil homme attend

lundi 24 octobre 2011

miettes

ils vivaient de nos miettes,
pourtant ne l'avions-nous pas assez entendu ?
"on ne jette pas le pain,
c'est sacré,
on ne gaspille pas la nourriture,
c'est sacré",
scie de l'après-guerre,
 la révolte viendrait,
elle grondait déjà

dimanche 23 octobre 2011

vendredi 27 octobre 1939 Notre Journal (3)

Ce matin nous avons découvert avec joie que le Baïgoura était couvert d'un chapeau de neige. (...) L'hiver semble cette année très précoce. Mais en classe nous n'aurons pas froid, car on nous a porté hier, une belle charrette de bois.

samedi 22 octobre 2011

premiers froids

la nuit s'effaçait peu à peu,
elle l'avait fauché sur place,
d'autres couraient,
d'autres regardaient,
d'autres se détournaient,
et c'était le même temps,
et c'était la même ville,
il ouvrirait les yeux,
se redresserait,
s'arracherait,
un homme

vendredi 21 octobre 2011

ils investissaient

elle vivait là-haut,
son chez elle,
une guérite ou un phare,
pourtant le monde elle n'en avait cure,
mais la tête dans le ciel, oui,
elle craignait juste appétit et convoitise qui un jour l'expulseraient.

jeudi 20 octobre 2011

c'était quoi déjà

on cherchait, regardait,
et l'oubli progressait,
dans ses poches les clefs

mercredi 19 octobre 2011

chambre n° ...

Serpillère passée à grande eau dans la salle de bains. Aérer et que ça sèche, vite ! On l'a posée sur le fauteuil. Pratique pour coincer la porte de communication. Elle ne peut ni parler, ni bouger. Elle regarde.

mardi 18 octobre 2011

plus si affinités

capter les regards,
deviser un brin,
  passer son chemin

lundi 17 octobre 2011

ligne de crête

on a laissé l'ombre derrière soi, 
elle guette de de l'autre côté, 
répit

vendredi 14 octobre 2011

24 octobre 1939, Notre journal (2)

 (...) Notre maîtresse nous a fait allumer le feu.
Marie-Louise, Jeanne et Marie ont été chargées de faire ce travail. Elles ont été bien maladroites puisqu'il leur a fallu un quart d'heure pour réussir à l'allumer.

jeudi 13 octobre 2011

l'aïeule

nos regards parfois se croisaient
le sien errait dans le passé
le nôtre fixait l'avenir

mercredi 12 octobre 2011

retour

dimanche d'automne,
seul le vent balaie la ville,
 feuilles mortes sur les trottoirs

mardi 11 octobre 2011

Tard dans la vie

 TARD DANS LA VIE  
La liberté des mers Pierre Reverdy

Je suis dur
Je suis tendre
                 Et j'ai perdu mon temps
                 À rêver sans dormir
                 À dormir en marchant
Partout où j'ai passé
J'ai trouvé mon absence
Je ne suis nulle part
Excepté le néant
Mais je porte caché au plus haut des entrailles
A la place où la foudre a frappé trop souvent
Un cœur où chaque mot a laissé son entaille
Et d'où ma vie s`égoutte au moindre mouvement

lundi 10 octobre 2011

Forteresses

carte bleue, photocopieur, sécu, impôts, vote, paiement, consultation des comptes à distance, cahier de textes en ligne, connexion internet...  des codes, encore des codes, surtout ne pas utiliser le même,  histoires de vols, d'escroquerie, la mémoire saturait... on se rappelait pourtant cette publicité, à la caisse, une vieille dame, trou de mémoire, code au revers de l'oreille de son teckel, sauvée, l'éclat de son sourire... Alzheimer, solitude, un concentré de nos angoisses...armés d'incertaines combinaisons, on avançait ainsi. La peur gagnait. On fermait derrière soi. Si fragiles forteresses.

vendredi 7 octobre 2011

Vases communicants octobre 2011 ana nb

Pour ce vase comunicant, j'ai volé à Pascal Quignard ces mots «Celui que nul ne voit et qui séjourne partout est le temps» et j'ai proposé à Elise de partir de là, du temps.

Je me souviens de votre prénom Elise au tout début de mon entrée dans Le petit journal de François Bon, je vous lis comme une voleuse vole des choses simples et profondes, des choses émouvantes, dans un lien fort avec ce qui vous entoure la terre les gens, bienvenue dans le jardin sauvage
***
Le temps invisible est partout et chaque homme porte le temps invisible

Longtemps vous imaginez le temps une maison noire aux murs infiltrés de poussières de lumière et,

un jour vous partez un peu plus loin de ces murs de ces murs noirs de temps - un peu plus loin de d'habitude -  un peu plus loin de comme - un peu plus loin de c'est  -


Et vous marchez là ici là-bas là-bas plus loin sur une route,

une route droite de jour une route courbe de jour une route  droite de jour une route courbe de nuit une route droite de  jour  une route brisée de jour une route droite de jour une route courbe de jour une route brisée de nuit une route droite de jour une route droite de jour une  route droite de jour une route droite de jour une route droite de jour un chemin de nuit


vous marchez,

les arbres nus se couvrent de feuilles de fleurs de fruits et  les arbres nus redeviennent nus.

Vous vous arrêtez.

Vous levez la tête vous voyez le ciel se couvrir de sombres sciures vous voyez une main  tracer d'un geste précis la fin d'un cercle double.

Votre corps éprouve la tristesse du ciel.

Vous tournez maintenant sur un cheval bleu et autour du cheval bleu des cris d'enfants et plus loin des corps perdus dans une foule. 

Plus tard vous croisez des géants des danseuses des garde – barrières des voleurs des vendeurs des dealers des comédiens, des souffleurs de verre, des musiciens, une sorcière s'approche du miroir, vous refermez le livre,

et vous marchez.


Le temps invisible est partout et chaque homme porte le temps invisible, un jour il est là devant vous il ne porte pas de nom, vous apprenez le temps n'a pas de nom.

Vous entrez dans une pièce blanche
Un homme avance vers une table nue
Le corps de l'homme est droit
Vous regardez ses mains sur la table nue
L'homme parle
L'homme dit le temps n'existe pas
La voix dit seul le temps invisible existe


Puis
Silence
Noir




Vous marchez maintenant sur un chemin de nuit.


Vous apprenez la première heure, la première couleur le premier mouvement vous apprenez les choses profondes mêlées à la vie, vous apprenez la pauvreté de la terre et la beauté du vent des traces du vent sur les herbes les fleurs les arbres votre visage, vous apprenez la beauté de l'empreinte d'un corps la fragilité du feu du souffle du mot brisé vous apprenez à,



la terre bouge autour de vous et le ciel et les étoiles et les éclairs les nuits d'été vous marchez maintenant vous ignorez toutes les route parcourues, vous ignorez les mots pour dire depuis quand vous marchez, vous ignorez les images perdues, vous fermez les yeux tous les yeux de l'enfance et,



vous courrez vous courrez et devant vous les arbres s'écartent et vous courrez dans le vent dans la pluie dans le,

et sous vos pas tout s'efface les bruits les décombres les combats acharnés les guerres les bruits du sang et de la poussière, votre corps chute sur le chemin de nuit des milliers de grains de sable griffent votre peau,

au-dessus de vous tout s'inscrit dans les marques des  nuages entre le ciel et la terre, les extrémités de la ligne d'horizon, 

Vous marchez maintenant dans la realerrance.



ana nb

*** 
Le Petit Journal de François Bon, notre trait-d'union initial, et Ana une voix singulière pour dire la ville, la nuit, l'errance, les rêves éveillés, une rencontre.

La phrase de Pascal Quignard « Celui que nul ne voit et qui séjourne partout est le temps» proposée pour point de départ m'a accompagnée au cours de ces jours.

Merci Ana, de m'avoir invitée à ce vase communicant avec vous, bienvenue dans Même si...

Tiers Livre et Scriptopolis sont à l’initiative d’un projet de vases communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.

Grand merci à Brigitte Célérier pour la liste des blogs participant aux “vases communicants” d'octobre.

jeudi 6 octobre 2011

25 octobre 39, Notre journal (1)

"Mademoiselle nous a lu un discours que Giraudoux a adressé à tous les enfants de France."


mercredi 5 octobre 2011

une fracture

et la matrice du temps s'ouvre,
plongeon dans l'originel,
des enfants grandissent

mardi 4 octobre 2011

je t'aime si fort

rue semi-piétonne, neuf heures du soir, la nuit, sur le trottoir un enfant et son tricycle, voiture, la mère fonce, il protège son visage de ses bras, fessée, ses cris aigus, Tu me fais mal, elle, rageuse, La prochaine fois c'est moi qui te jette sous la voiture.

lundi 3 octobre 2011

jour après jour

la pierre hurlait,
son visage se ridait,
drôle de burin

samedi 1 octobre 2011

attaches (1)

ce qui nous avait reliés se désagrégeait sous nos yeux, on regardait
***

Les cormorans Philippe Jaccottet

     (...) Après quoi, on se retourne sur ce temps vécu hors du temps ; et comme le naturel est revenu à peine est-on rentré chez soi, on recommence à s'interroger : ce temps, ne l'a-t-on pas tout simplement perdu ? Et si l'on n'a rien voulu chercher, hors le changement et l'oubli, rien ne vous a-t-il trouvé, sans qu'on le veuille, sans qu'on ait pu le prévoir? En dehors de ce que la simple curiosité note au passage, n'y a-t-il pas eu de signes pour pénétrer en vous aussi profond que ceux que l'on accueille dans la tranquillité patiente de la maison? Des rencontres, même brèves, comme celle du prieuré de Serrabone, où un monde étranger et presque perdu, presque inaccessible, vous est rouvert un instant ? C'est cela qu'il me faut à présent déceler à travers notes et souvenirs.
     Oui, on cherche à se laver les yeux, on poursuit l'inconnu. Les yeux veulent boire de nouveau, enfin, à quelque chose de vif, de frais, de caché et d'inaltéré comme une source. Autour de soi, trop près de soi, on ne sait plus le trouver. Alors, comme un enfant, comme quiconque rêve et ne peut s'empêcher de rêver à ce qui est a "de l'autre côté de la montagne" ou "derrière le mur", à l'invisible, on franchit les frontières en s'imaginant qu'aussitôt ce pas fait, tout sera différent, comme diffèrent les drapeaux et les noms qui désignent les pays. Et si d'abord cette naïve attente est déçue, parce que les vraies limites ne sont pas nécessairement où l'histoire les a pour un temps fixées, plus lentement quelque chose se passe, qui bientôt presque la comblera.
 
     (...) Ainsi, le voyage avait bien fini par devenir intérieur, on était revenu en soi, on n'avait finalement accueilli en soi que ce qui déjà s'y cachait plus ou moins farouchement. Le tout différent, on l'avait oublié ; seul le tout proche, sans qu'on s'en doute d'abord, avait eu accès en vous. Une fois de plus, on n'était pas sorti de soi-même ; on ne s'était ni changé  ni renouvelé. Ce voyage était presque la même chose qu'un rêve, on n'était pas sorti du labyrinthe qu'ajoure de plus en plus rarement à mesure qu'on vieillit la lueur rose d'un corps ou une vraie fenêtre ouverte sur une prairie apparemment sans limites, et qui ramène toujours les pas et les yeux vers le même monstre, vieux visage d'homme ou de femme qui crie, muettement ou pas, I'étonnement et l'horreur d'être détruit.