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samedi 30 avril 2011

l'agneau du 11 avril

là, sûr... c'est le dernier pour cette année, on la trouvait grosse aussi... tu parles, elle était pleine... cinq mois, suffit de compter,
on a enlevé le bélier le 14 novembre

vendredi 29 avril 2011

château et dépendances (1)

la petite serre,
ne pas oublier
d'arroser

jeudi 28 avril 2011

L'éloquence des larmes Jean-Loup Charvet

Artemisia Gentileschi, Marie-Madeleine (détail)
... des années plus tôt, cliquer ici,
disque écouté en boucle, si peu de traces aujourd'hui de Jean-Loup Charvet ... et pourtant...
(citées et commentées dans le livre qui accompagne le disque, reproductions 1 et 2)

L'éloquence des larmes Jean-Loup Charvet

(...) On pourrait presque ici parler d'extase méthodique, comme on parle ailleurs de doute méthodique. Extase définie comme cette attitude qui nous tient hors de nous-mêmes, là où veut bien nous placer la souffrance quand elle sait ne pas nous détruire. On ne pratique pas les larmes, on est gagné par les larmes. Elles sont sans doute un degré ultime de conscience, un moment d'"attention extrême".
1 Artemisia Gentileschi, Marie-Madeleine
    Les vraies larmes se donnent. Ou, plus exactement, se reçoivent. Elles sont la dernière chose que l'on a le droit de gaspiller, car on ne peut les acquérir. Parce qu'elles sont la chose la plus précieuse au monde, elles se donnent, ou plutôt elles sont données. On parle du don des larmes.

 
   Les larmes s'offrent à notre visage comme à notre pensée ou à notre cœur, leur évidence leur épargne une définition, leur intelligence les en protège. Leur claire transparence leur évite une description. Pour nous donner leur lumière, pour nous donner leur légèreté, pour nous offrir leur silence, elles se sont confiées à l'obscurité, se sont soumises à la pesanteur, se sont données aux soupirs. Pas de clarté sans clair-obscur, pas de pesanteur sans apesanteur et pas de son sans "silence mélodieux". Au risque de notre incarnation et de notre béatitude. Entre chair et ciel. Horizon transparent.

2 Jacob Jordaens Les Disciples au tombeau
     Parole incarnée, la larme n'est donc jamais un argument, peut-être tout juste une preuve, et encore sans doute malgré elle.
    Vision, elle se tait dans la lumière. Mots éblouis. Regards muets d'avoir vu.
    Épiphanie, c'est-à-dire, au sens étymologique du terme, apparition lumineuse, la larme est du domaine de la certitude profonde, de la clarté reçue, du mémorial joyeux.
   Comme la parole vient au muet, comme la vue illumine l'aveugle, comme la marche fait danser le boiteux, les larmes ne sont données qu'à celui qui, longtemps, est demeurée sur leur bord. Elles n'ont pas d'origine visible, pas de fin déterminée. C'est ce qui fait leur force. Notre plus belle existence s'inscrit dans leur chiffre de fuite, notre plus juste discours dans leur éloquence muette, notre peinture la plus forte dans leur transparence, notre écriture la plus parlante dans leur silence. Elles nous aveuglent dans une vision plus absolue que celle du regard.
Les larmes de St Pierre
   Les vraies larmes nous confient qu'elles ne sont pas de nous tout en venant du plus profond de nous-mêmes. C'est quand la larme s'échappe de notre corps qu'elle signifie, qu'elle le signifie le mieux. On ne pleure vraiment qu'en perdant ses larmes, comme on ne croit vraiment que si l'on a déjà une fois douté. L'invisible s'écrit sur nos visages en s'incarnant, en s'effaçant, par la force de nos larmes. L'évidence de cette force nous éblouit dans son obscurité, comme la chute peut nous faire gravir un échelon vers le ciel.

La Sainte Famille

mercredi 27 avril 2011

l'amour est dans le pré

- s'il te plaît, câlin
 
- approche,
que je te fasse des guilis dans le cou

mardi 26 avril 2011

crépuscule

des moutonnements
les oiseaux font silence
il a neigé sur les acacias

lundi 25 avril 2011

naissance (1)


leur naissance
l'objet de soins jaloux
Il y en avait sept, elle en a écrasé un, un autre qui est mort, je les lui ai sortis, elle continue à couver,
une joie et une fierté,
mais là, j'en ai trop, j'ai quand même tué huit poulets hier... alors j'en ai mis deux à 
déglousser

mercredi 20 avril 2011

le château

une dépendance
entrée

mardi 19 avril 2011

chemin

le troupeau se hâte, couper, et dans le pré creuser une ligne de désir

samedi 9 avril 2011

elle se tient là souvent, Les feux de l'amour sont terminés, parfois un peu de couture, un bouton, une reprise, les doigts se font gourds, les après-midis longues, combien de temps encore avant la nuit

vendredi 8 avril 2011

brisée

 
sauver ce qui peut l'être,
et tirer le rideau

jeudi 7 avril 2011

traduit de l'espagnol par Silvia Baron Supervielle

Presque poésie. La vision et la parole ne coïncident pas toujours avec la somme du poème. Souvent il n'en reste que des noyaux, des germes, des images ou des frôlements, comme des vestiges ou des récoltes paradoxales d'un naufrage. Or toute la poésie est-elle autre chose ? Peut-être nous faudrait-il parler ici de fragments en chute, échardes de poèmes, gestes d'approche, morceaux de matière poétique de textes qui n'ont pas terminé de naître. Et nous consoler avec l'idée que naître est un procès qui ne se termine jamais.

mercredi 6 avril 2011

"Il voulait seulement voir : voir."


traduction de l'espagnol par Fernand Verhesen
8

Dibujaba ventanas en todas partes.
En los muros demasiado altos,
en los muros demasiado bajos,
en las paredes obtuses,
en los rincones,
en el aire y hasta en los techos.

Dibujaba ventanas coma si dibujara pajaros.
En el piso, en las noches,
en las miradas palpablemente sordas,
en los alrededores de la muerte,
en las rumbas, los arboles.

Dibujaba ventanas hasta en las puertas.
Pero nunca dibujo una puerta.
No queria entrar ni salir.
Sabia que no se puede.
Solamente queria ver : ver.

Dibujaba ventanas.
En todas partes.
8

Il dessinait partout des fenêtres
Sur les murs trop hauts, sur les murs trop bas,
sur les parois obtuses, dans les coins,
dans l'air et jusque sur les plafonds.

Il dessinait des fenêtres comme s'il dessinait des
                                                                oiseaux.
Sur le sol, sur les nuits,
sur les regards tangiblement sourds,
sur les environs de la mort,
sur les tombes, les arbres.

Il dessinait des fenêtres jusque sur les portes.
Mais jamais il ne dessina une porte.
Il ne voulait ni entrer ni sortir.
Il savait que cela ne se peut.
Il voulait seulement voir : voir.

I1 dessinait des fenêtres.
Partout.

mardi 5 avril 2011

aux champs

 une jeune mère et sa fille
pays noyé dans bruine et crachin, sortir quand même,
 rejoindre les autres, un tel réconfort

lundi 4 avril 2011

la vieille vigne

c'était la fierté de son père, et déjà son tour d'être vieux, alors il achète de nouveaux plans, c'était quoi ces histoires de lunes qu'il racontait aitaxi, on aurait dû l'écouter, il regarde pousser, taille ici ou là, sûr, elle aurait besoin d'être mieux entretenue, où trouver le temps ?
un tour dans les chambres des enfants, pas un n'est resté, ramasse leurs jouets, des nids à poussière dit sa femme, s'ils ont été gâtés...
là au moins, ça fera peut-être peur aux oiseaux,
même si à quoi bon, tout ça, le vin, ils n'en boivent pas, ils se soûlent aux alcools forts, les jeunes

dimanche 3 avril 2011

elle cingle

du revers de la main, par trois fois, j'atteins l'enfant, ses yeux qui questionnent, il ne comprend pas, ma joue brûle, je me réveille

vendredi 1 avril 2011

Chapelle d'Haranbeltz
La première élégie

Qui, si je criais, m’entendrait donc, d’entre
les ordres des anges ? et supposé même que l’un d’eux
me prît soudain contre son cœur, je périrais
de son trop de présence.
Car le beau n’est rien
que ce commencement du Terrible que nous supportons encore,
et si nous l’admirons, c’est qu’il dédaigne, indifférent,
de nous détruire. Tout ange est terrifiant.
         Du coup, je me contiens, je ravale le cri d’appel
d’obscurs sanglots. À qui, hélas, pouvons-nous
recourir ? Ni aux anges, ni aux hommes,
et les bêtes sagaces, flairent bien
que nous ne sommes pas vraiment en confiance
dans le monde expliqué. Tout juste s’il nous reste
un arbre ou l’autre sur la pente, à revoir
jour après jour ; s’il nous reste la route d’hier
et quelque fidèle habitude, trop choyée,
qui, de se plaire auprès de nous, ne repart plus.
         Et j’oubliais : la nuit, quand le vent chargé d’espaces
tire sur notre face – à qui manquerait-elle, la nuit désirée,
doucement décevante – peine et menace
pour le cœur solitaire. Est-elle aux amants plus légère ?
Ah, ils ne savent que s’entre-cacher leur sort.
         L’ignores-tu encore ? Que tes bras ajoutent leur vide
aux espaces par nous respirés, et les oiseaux peut-être
éprouveront l’air élargi d’un plus intime vol.
 
R. M. Rilke, Les élégies de Duino, traduction et postface de Philippe Jaccottet, La Dogana, 2008, p. 9 et 11.