Lu
Les années d'Annie Ernaux
Vu
Quai des orfèvres d'Henri-Georges Clouzot
Zumaia, plage d'Itzurun, 19 déc, 5 h |
le vent se fait mordant, un pêcheur s'arcboute à sa canne, du sable projeté au visage par poignées, il pense prendre quoi là, cette obstination
Zumaia, plage d'Itzurun, 19 déc, 5 h. |
un léger toc toc à la porte, la voisine de palier, sourire aux lèvres, des mines de conspirateur, le mari se tient dans l’embrasure de leur appartement, le paquet enrubanné qu'elle cachait dans son dos passe dans mes mains, aller lentement, défaire les agrafes, deviner un objet, faudra-t-il se composer un visage reconnaissant, Mais, vas-y, tu peux déchirer, elle s'impatiente, un couple de colibris sculptés jaillit, ma joie éclate, je les gardais depuis mon retour du pays, fin octobre donc, quand elle a visité sa famille en Côte d'Ivoire, nous tombons dans les bras l'une de l'autre
Dans la rue à sens unique, remonter les voitures arrêtées au feu rouge. A plusieurs reprises, la voix stridente d'une jeune fille se fraie un chemin dans le brouhaha. Madame L... Madame L... se pourrait-il que votre nom résonne ? Regarder de tous côtés, une erreur sans doute. Quelques pas plus loin, côté chauffeur, une fenêtre baissée, regard rieur de la mère sur l'air de vous la connaissez comme moi, La jeune fille Ah ! je suis trop trop contente de vous voir, vous allez bien ? Toulouse c'est génial, je suis trop trop contente d'étudier là-bas. Le feu passe au vert, un grand espace se creuse devant, démarrer avant les premiers coups de klaxon.
Getaria, vignoble du txakoli |
Zarautz, Getaria, Zumaia, le vent mugit sur les hauteurs,s'engouffre sous les arbres,
Getaria, 19 déc 2022 |
personne sur le chemin, presser le pas,
Zumaia, plage de Itzurun |
à l'arrivée, le ciel se déchire, courir, elle va s’échapper, cette lumière-là,
"le temps, ce grand sculpteur" écrivait Marguerite Yourcenar
sur un présentoir banc des kilomètres d'Annie Ernaux, se pencher, prendre, feuilleter, reposer, prendre encore, derrière, au-dessus de vous la voix fraîche d'une jeune fille, D'elle j'ai juste lu La Place, prends Les années. Tu veux bien me lire la quatrième de couverture ? Il s'exécute, lit avec lenteur, concentré sur la ponctuation. "La photo en noir et blanc d'une petite fille en maillot de bain foncé, sur une plage de galets. En fond, des falaises. Elle est assise sur un rocher plat, ses jambes robustes étendues bien droites devant elle, les bras...". Se retourner. Un beau visage carré tendu vers lui, de grands cheveux bruns. D'épaisses lunettes noires aussi.
Belle, élégante, elle vous fait une place puis sur l'air de Ne vous fiez pas aux apparences "Mon père est indien" un peu plus tard "Chez nous..." et en réponse à votre sourcil interrogateur "Quand je dis chez nous, je veux parler de la Côte d'Ivoire, j'ai été élevée là-bas, chez nous donc, c'est pas comme ici, on va à la messe tous les dimanches pas seulement pour les fêtes comme Noël ou Pâques, et à la quête on se débarrasse pas de ses pièces; des un ou deux euro, tout le monde donne des billets elle enchaîne vous connaissez Lourdes ? eh ! bien à Lourdes, quand y a messe à la grotte, des personnes continuent de longer les parois, d'autres font des photos, comment voulez-vous vous concentrer, et d'un ton péremptoire et définitif, elle tient sa conclusion plus personne a la foi c'est pour ça qu'y a plus de miracle à Lourdes
Lu
A la ligne Feuillets d'usine de Joseph Ponthus
Chantiers de Marie-Hélène Lafon
Vu
Dans la mesure de l'impossible de Tiago Rodrigues
Eta orai zer de la Compagnie Kukai Dantza
une jolie devanture, quelqu'un furète déjà parmi les rayons, pousser la porte, un tintement, le libraire tapi derrière un minuscule comptoir tend la tête vers vous, des questions du client, il quitte son refuge, encaisse, un bonnet, des gants, des mitaines, une doudoune, à vous "On n'a pas les moyens de chauffer, alors et désignant du geste ses vêtements j'ai beau être habillé deux couches, je continue à avoir froid"
bonheur de se laisser porter, pas besoin de réfléchir au sens de circulation, aux travaux dans la ville, regarder autour de soi, des jeunes gens, tiens ! les sourcils se font très dessinés, des mamans, des vieilles personnes, des sac à dos, des caddies, des poussettes, des cannes, des déambulateurs, se faire une place, céder une place, se sourire, un brouhaha de voix de langues, quelqu'un lit, regarder par les fenêtres, avenue de la Résistance Jean Mermoz, façades des maisons anglaises, jardins d'hiver, cèdres, surplomber grilles des parcs et jardins, grand bleu, ces derniers jours un coup de vent, une pluie drue, arbres partout dénudés, Parc Lawrance, le ménage n'a pas encore été fait, bonheur encore, en rond tapis de feuilles luisantes et colorées, ailleurs des hommes munis de gros aspirateurs, c'est un voyage, il prend fin, descendre
La vendeuse Tout augmente, affolant , avec mon petit SMIC et mes 460 euro de loyer, heureusement que je peux manger un peu ici, en novembre, on a reçu une prime de l'état et comme je suis célibataire sans enfants pour moi c'était 28 euro, vous vous rendez compte, 28 euro ! c'est se moquer du monde, je me suis sentie humiliée, et si j'avais pu la rendre, cette prime, sûr, je l'aurais fait, à vous dégoûter de travailler, au client suivant, sourire, et pour vous ce sera ?
Lu
Des jours sauvages de Xabi Molia
Hélian et autres poèmes de Georg Trakl
Les cours en visio me donnent envie de mourir de Marion Honnoré
il déverse un tombereau de colis, elle virevolte parmi les colis en maugréant, Non mais c'est pas croyable, y a des gens mais c'est deux fois par semaine qu'ils viennent, et les questions au téléphone C'est volumineux, c'est lourd parce que vous comprenez je veux savoir si je prends la voiture, tout ça alors qu'ils habitent à deux rues, des croquettes pour chien ou chat, du maquillage bio, des produits diététiques, qu'est-ce que j'en sais, se tournant vers lui, Combien t'as dit qu'y en avait, dix-sept ? elle consulte sa feuille, oui, c'est ça, bip, bip, scanner le code barre, zut et le dix-septième ? tu le vois ? il est où le dix-septième ? ah ! là, il est tombé derrière la chaise, bip, c'est fini, griffonner une signature, le bon de livraison est prêt, le livreur s'attarde, sort son portable Ben oui, il a cinq minutes d'avance, pour que je sois payée, il faut qu'il parte pile à l'heure.
être invitée aux quarante ans d'un élève, strate école primaire, il ne manque de rien, va pour un cadeau gourmand, pourquoi pas une tomme de brebis Ossau Iraty du petit petit cousin, J -3 apprendre qu'il ne mange JAMAIS de fromage. Vite, un plan B !
9 novembre 2022, brebis manech |
une jolie toison neigeuse et tendre, un agneau né du jour encore frêle sur ses pattes, 2012/2022 à dix ans d'écart, la question boomerang.
Des années ont passé. Revoir une amie malade. Toquer à sa porte. Elle ouvre, pliée sur des béquilles, maigreur d'un visage devenu osseux, flottement, suspens, votre visage dit l'incertitude, se reprendre Ce ne peut être qu'elle, bredouiller piteusement Ben, on a changé, pas vrai ? et retrouver instantanément la grâce de son sourire, la chaleur de sa voix, goûter aussi à la précision de sa parole. Un chat se glisse paresseusement dans nos jambes. Une fin d'après-midi avant le passage de l'infirmière.
Pau, 25 novembre 2022 |
une éclaircie, prendre son petit seau, ciel et végétation lavés de frais, les couleurs s'exaltent, l'automne quand même, le composteur est derrière le buisson, se signaler par un piétinement, donner le temps de fuir au rat croisé parfois, soulever le couvercle, plus compliqué de le rabattre, ce sera comment dans quelques années et s'en revenir
Lu
Parias de Beyrouk
C'est vous l'écrivain Jean-Philippe Toussaint
Lettres d'amour sans le dire d'Amanda Sthers
Vu
cinéma
Le Chien de François Chalais, séance animée par Laurent Galinon, auteur de Delon en clair obscur
théâtre
Vous avez peut-être déjà croisé le travail du chorégraphe et metteur
en scène Michel Schweizer, invité aucours des saisons passées par la
scène Espaces Pluriels au Théâtre Saragosse ou au Parvis pour ses pièces Cheptel, Cartel, Primitifs, BôPEUPL et les projets participatifs Keep Calm et Faire Monde.
Il
sera présent en compagnie du danseur et chorégraphe Mathieu
Desseigne-Ravel et d'un jeune interprète sur le plateau du Théâtre
Saragosse le jeudi 1er décembre pour vous présenter une étape de travail
de leur création en cours Nice Trip. Nous serions très heureux de vous retrouver à cette occasion !
En juillet 2017, était présentée la pièce Bâtards dans le cadre des Sujets à Vif du Festival d'Avignon. Avec Nice Trip, nous souhaitons, Mathieu Desseigne-Ravel et moi-même, prolonger cette collaboration en développant cette proposition pour en faire un format d'une heure environ. Aujourd'hui, plus de 40000 kilomètres de murs frontières contrarient les mobilités humaines d'enfants, de femmes et d'hommes désireux de sauver leur vie, et il apparaît plus facile d'agir sur la circulation des personnes que sur celle des capitaux… Au regard d'une actualité toujours vive et soutenue sur ce sujet éminemment politique, nous imaginons cette suite en intégrant la présence d'un adolescent.
Michel Schweizer, juin 2021.
Mathieu Desseigne-Ravel découvre l'acrobatie et la danse hip-hop avant de se former au Centre National des Arts du Cirque (CNAC) de Châlons-en-Champagne puis d'intégrer les Ballets C de la B d'Alain Platel. En 2006, il rejoint Nabil Hemaïzia et Sylvain Bouillet et participe à la vie du Collectif 2 Temps 3 Mouvements. Quand celle-ci prend fin, en 2014, Mathieu Desseigne-Ravel et Sylvain Bouillet poursuivent l'aventure avec Lucien Reynes à travers Naïf Production, structure hors standard, sans hiérarchie, qui appréhende la création comme un processus entièrement collectif. Ils ont récemment créé Gravithropie et La Grande cordée (2021).
Depuis une vingtaine d'années, Michel Schweizer convoque et organise des communautés provisoires sur scène en vue de composer une partition au plus près du réel. Dans ses créations, il se joue des limites et des enjeux relationnels qu'entretiennent l'art, le politique et l'économie et porte un regard caustique sur la marchandisation de l'individu et du langage. Plus généralement, il nous invite à partager une expérience dont le bénéfice dépend de notre capacité à accueillir l'autre, à lui accorder une place. Michel Schweizer entretient une connivence de long terme avec la scène Espaces Pluriels, qui a programmé plusieurs de ses pièces (Cheptel, Primitifs, bôpeupl) et lui a confié deux créations avec des amateurs (Keep Calm et Faire Monde).
un matin face au poste fixe, le ciel s'est dégagé, grand soleil, laisser la baie sur le balcon ouverte, un commentaire, chouette ! tâcher de répondre, pas votre fort, se concentrer, prendre peu à peu conscience d'un bruit sourd dans votre dos, à force ça agace, des chocs sourds et espacés, finir par vous lever, et là, l'émerveillement, un rouge-gorge est entré et cherche la sortie, il bute sur les baies vitrées, pourvu qu'il ne s'assomme pas, envie de le prendre en photo, il est tout près de vous, mais un élan encore et il disparaît dans l'azur. Au revoir !
elle parle d'une thèse, les bruits des villages au XIX ème siècle, elle ne développe pas mais autre urbanisme, arrière cour, métiers, forgeron, maréchal-ferrant, bûcheron, sonnailles, songer alors à la vitesse de l'oubli, se transporter à ce matin-là, peut-être posé ici mais qui pour s'en souvenir, même plus vous, on dira, plus chic, que c'est une variation, se souvenir de ce matin-là, le demi-sommeil d'avant d'aller en cours, une voix masculine, presque toujours masculine à cette heure-là, le cours du Collège de France, en contrepoint une sorte de picotements, de petits coups secs irréguliers, un agacement, c'était donc quoi, ça venait pas du poste au moins,
puis reconnaître et le soulagement, la craie à l'appui de la démonstration, il y a peu pourtant votre quotidien aussi la craie, gliser alors vers cette salle de classe aux murs lézardés, aux affiche à leur assaut, à droite avec son cadre rose en A4, J'apprends de Brigitte Giraud,
secrète mise en abyme, secrète incitation à conjuguer correctement les verbes en "endre" au présent et secret espoir de toujours se renouveler J'apprends
le lendemain matin, courte balade du côté de Castet, un village tout près de Pau. Au pied d'un chêne quelques jonquilles en fleur. Hésitation des saisons.
Le gui, lui, s'accroche !
jusqu'à la vaisselle qui n'a pas changé, se souvenir alors d'une histoire entendue ailleurs alors qu'on s'attardait sur l'emballage du sucre, le patron d'un autre café,
Kafe Negro ça passait plus, il avait les réseaux sociaux contre lui et ça commençait à monter, alors il a changé l'emballage, le nom Kafe Negro et c'est passé comme une lettre à la poste, je vois pas ce que ça change, c'est pareil, non ? pas tout à fait quand même, Kafe Beltza Café noir, une autre langue, un autre visage, un béret pour dire le gars du coin, l'accent sur une identité et toujours vendre
Elle s'assied, regard laser.
-Mais dis-moi, t'as beaucoup maigri.
- Pas depuis la dernière fois qu'on s'est vues début juin.
Elle n'en démord pas, insiste et lâche :
- Si, si, t'as maigri du visage, le reste je sais pas, je te vois assise, mais le visage, alors là c'est frappant.
- Tu veux dire que j'ai pris un coup de vieux, c'est ça ?
Vieillir. A ne pas dire. Elle se reprend.
- Non, c'est pas ça, je me suis inquiétée, t'es pas malade, t'es sûre ?
Lu
Bleu nuit Dima Abdallah
Le corps de l'âme de Ludmila Oulitskaïa
Vu
théâtre
La Reprise. Histoire(s) du théâtre (I) conception et mise en scène de Milo Rau
Il appelle sa mère tous les soirs. Deux opérations lourdes à quatre-vingt-dix ans passés, elle récupère comme elle peut. L'infirmière entre, elle raccroche mal, il entend la conversation. Voix joviale Bonjour Madame M. je viens pour le pansement, alors à la cuisse gauche ou la cuisse droite ? bredouillements confus, ah, vous savez pas, on va regarder, mais je vois rien moi, pas grave, je vais appeler la chef, Elle vient de réintégrer sa chambre après une intervention pour occlusion intestinale.
Au restaurant, elle laisse au fond de la grande assiette creuse les têtes de chipirons à la galicienne "Il terminait mes plats, sourire vaillant, une fêlure puis la voix se charge de tendresse, c'était mon composteur, oui, mon composteur, je l'appelais comme ça"
Place Clémenceau, rue Serviez, presque huit heures, se hâter, le spectacle n'attendra pas. En sens inverse, à vélo, un père et son fils, petit bonhomme en ciré jaune. Six sept ans maxi. Tous deux noir ébène. La pluie collante de novembre, les trottoirs mouillés, de rares passants fantomatiques. Resserrer son écharpe. Ils pédalent. Ça monte un peu, le petit est à la peine, le père "Allez, on y est presque". Un gros sac sur son dos. Lire machinalement et penser un Uber eats. S'en vouloir. Un homme.
Ses doigts habiles s'activent, le crochet va-et-vient. Le grand châle pour se draper comme la prof de danse prend forme. Tu comprends, elle, elle a le droit et pas nous lui a dit pas sa petite fille c'est pas juste. Parfait pour cadeau de Noël. Je lui ai demandé quelle sorte de rose elle voulait, voilà qu'elle ne porte plus que du noir. Son âge ? onze ans, elle vient d'entrer en sixième. J'espère que ce vieux rose lui plaira quand même.
zona de Especial Proteccion de los Valores Naturales Costa da Morte 26 sept 22 |
Masses marron posées sur les rochers à droite de la piste.
Des vautours ?
vers Fisterra |
mises en garde insistantes,
ne pas quitter le sentier,
prudence,
avancer donc à pas menus,
et s'étonner des chèvres et des chevreaux, un petit troupeau paresse là dans la tiédeur du jour.
on en croise parfois au parc ou au bord du gave, leur chien gambade autour d'eux ou tente de tirer sur la laisse mais avant de les voir, leur voix grondeuse, autoritaire, tyrannique Ici... Non là... au pied... il obéit toujours, dévoué, le regard quêtant leur approbation, évidemment ça ne va jamais et songer, c'est quoi leur relation aux autres à ces maîtres
Lu
Les cantiques du corbeau Bartabas
La bonne chance de Rosa Montero
La fille de la supérette de Sayaka Marata
Vu
Orfeu negro de Marcel Camus
Armaggedon Time de James Gray
Dalida de Lisa Azuelos
Le long du gave de Pau, à hauteur de Jurançon, ils sont deux penchés sur une souche d'arbre, une grand sac en plastique bien plein à la main. S'approcher, ils vous montrent, lui, l'excitation du cueilleur dans le regard C'est la piboule du peuplier. Avec son petit goût de noisette, ail et persil, un régal. Et le voilà lancé sur ses projets, le champignon une passion. Bientôt, c'est sûr, il en fera pousser sur son lopin de terre du côté de Bagnères-de-Bigorre. Elle, bientôt maman, se pliant avec difficulté et les lui soumettant Celui-là pas trop vieux ? lui toujours au bonheur de partager Il faut prendre le plus frais et ne pas cuisiner les pieds, vers elle Oui, oui, c'est bon, tu peux y aller tranquille. Repasser par là un autre jour, d'autres ont poussé, songer qu'au pays d'enfance, aller aux champignons, c'est aller aux cèpes exclusivement, délaissées par exemple girolles ou trompettes de la mort, sentiment de transgresser en cueillant puis cuisinant les jolies petites piboules tout frais sorties de terre, il avait raison, délicieux.
A peu près du même âge. Elle, une Paloise, de la ville donc.
- Ne me dis pas qu'à l'église tu as connu le temps des mantilles et des hommes séparés des femmes, ses yeux s'écarquillent, elle poursuit les hommes dans les galeries ? ah, oui, le Pays Basque et avec un soupir presque incrédule, je croyais que tout ça c'était du siècle dernier !
- Mais c'est le siècle dernier !
Son éclat de rire.
en bas des marches, vous l'avez vue du coin de l’œil, une femme en fichu tassée à même le sol, de grandes jupes colorées, pas jeune, tenter de passer comme si de rien n'était, à sa hauteur une plainte rauque, Pour manger, fraction de seconde vers elle, son regard et vous êtes faite, quelques mètres, fourrager dans votre porte-monnaie et demi tour, bien sûr que vous pouvez, trois sous dans son gobelet vide, son visage s'illumine, un sourire béant, beauté, là, se sentir éclairée, et sa voix, une voix rocailleuse résonne une autre fois, elle roule vraiment très fort les "r" "Merci sur toi"
Monter, place de l'Obradoiro vue de haut, tiens en face sur la façade du palais Rajoy, aujourd'hui hôtel de ville,
Saint Jacques en guerrier sur un cheval blanc tel un chasseur de Maures ? descendre, le musée, le Porche de la Gloire, du temps à la fin pour encore et encore des explications, la guide, Maria Rosal est généreuse. Au musée, une représentation de vierge enceinte. En Galice, elle dit, ça n'étonne personne. Sans doute une trace de la mythologie celtique dans notre culture, un hommage à la fécondité. Vous pouvez d'ailleurs en voir un autre exemple tout à côté à l'église Santa-Maria-Salomé. Cette église, vous vous y êtes attardée la veille, l'intérieur, le portail, il faisait bon mais de vierge enceinte point.
Y retourner et l'évidence de sa présence. Que voit-on, entend-on, sait-on du monde lorsque personne ne guide votre regard ou votre écoute ? et venue de loin, les associations parfois, cette question d'enfant, peut-être bien Manuela, une sixième Oui mais pourquoi les peintres ils dessinent Eve, si c'est la première femme, avec un nombril ?
s'arrêter là, à Camelle, Casa Fernando et Marí, les demander à la Pharmacie ou dans n'importe quel bar, une maison blanche, vous vous apprêtez à sortir votre téléphone, la pharmacienne court vers vous, elle vient de fermer son officine, Ils habitent là-haut, elle montre du doigt une volée de marches, vous pouvez aller frapper, vous comprendrez ensuite qu'elle a voulu épargner à Marí qui vient de se faire opérer de la hanche un aller/retour par de longs escaliers, bien raides, vous toquez à la porte, une grande femme rieuse vous accueille Ah ! tu es déjà là, on est à table, tu vas manger avec nous, cette difficulté à dire simplement oui, allez viens, mon fils a pêché du poisson hier soir, dès qu'il a un moment, c'est sa passion, le plat trône sur la table, quelques petites tomates qu'elle va chercher vite fait au jardin, oui ce sont les dernières, des lamelles d'oignon blanc, un filet d'huile d'olive, une grosse miche de pain, pas de couteau, Le poisson ça se mange avec les doigts, partager la dernière joue avec Marí, Le meilleur ! festin, Fernando à un bout de la table, leur fils à l'autre, mais il ne tarde pas à nous quitter, leur vie de jeunes gens, la mère avec les petits-enfants, elle sur le bateau avec lui, Tu comprends, dix-huit ans à peine, moi presque dix de plus, je pouvais pas la laisser, et la voix se fait tendre, regard coulissé vers elle, un bonbon, leurs rires, des nuits parfois à pêcher tous les deux en barque, puis la conversation prend un tour plus grave, Fernando prononce le nom du Prestige, vous n'osez plus vous tourner vers lui, oui, de grosses larmes silencieuses roulent sur ses joues, pour vous un vague souvenir, des images chassées par d'autres images, sur ce bout de côte un traumatisme toujours vif, 13 novembre 2002, la date ne s'effacera pas, elle préfère se rappeler la solidarité internationale, les femmes apportant bocadillos et café à toutes ces personnes venues du monde entier, lui revenant aux bottes maculées de mazout, aux trainées par toute la rue principale, à l'odeur, leur certitude à tous deux que quelque chose d'irréversible s'est produit alors, poisson et crustacés, le pouce-pied en particulier, ont perdu de leur saveur, ils se sont fait plus rares, l'après-midi a bien avancé, les quitter, leur nom comme un sésame dans le village, Rosario la prof de théâtre vous fait entrer chez elle, deux de ses élèves arrivent, puis c'est le jeune cuisinier d'un des bars du village en train de préparer une Tatin de figue pour le soir, il attend une tablée de copains, il se met en quatre pour vous trouver des timbres et vous offre une figue, J'étais chef dans un bon restaurant de Barcelone mais j'ai préféré revenir ici, j'ai tout ce qu'il me faut sur place, je descends au port et j'improvise, puis un passage
Camelle, Galice, Corogne, 22 septembre 2022 |
Tu verras, il reste encore des traces sur les rochers, ont affirmé Fernando et Marí, les chercher en marchant le lendemain vers Camariñas
23 septembre 2022 |
Oui, c'est peut-être bien ça, tu sais on n'a pas pu tout nettoyer, s'excuse presque un pêcheur croisé sur le chemin et avec naturel t'es pas venue nous aider alors ?
Lu
La petite communiste qui ne souriait jamais de Lola Lafon
Vu
La Conspiration du Caire de Tarik Saleh
Muxía (Camariñas au fond), 24 sept 2022 Galice |
personne d'autre dans l'eau, la baigneuse se retourne et marche vers vous Allez, viens, tu verras elle est pas froide, ça stimule, je suis de A Coruña, c'est pas loin et quand il fait beau comme ça, je viens ici pour le week-end et dors dans la voiture, alors, tu te décides ? son corps puissant rougi par les vagues ruisselle charriant des gouttelettes, éclats vifs dans la lumière, elle n'insiste plus et s'en retourne, vous hissez votre sac à dos sur les épaules
Elle vous l'avait appris. Pour des plantes de pied en capilotade, quelques mois plus tôt, un miracle. Ah ! bon tu ne connaissais pas ? on l'appelle aussi la plante du marcheur. En chercher à nouveau. Lui soumettre une photo. Récusé. Le plantain, elle écrit, se reconnaît par les stries parallèles (surtout au verso) qui vont jusqu'à sept. Celui-ci le lancéolé.
de pleines poignées dans ses chaussettes et poursuivre le long du gave, Jurançon,
de l'autre côté le château, Gelos, longer le haras, la passerelle de Mazerolles, Bizanos, le parc Beaumont, au fil de la promenade dériver vers l'autre langue, se surprendre à songer "ez nila begian hartua", littéralement je ne l'avais pas pris dans les yeux, c'est-à-dire mémorisé, maintenant oui, sans doute, je le reconnaîtrai le plantain
elle a pourtant déménagé mais l'impression que la maison ou alors est-ce sa vie flotte autour d'elle comme le feraient des vêtements trop grands
Lu
De nos frères blessés de Joseph Andras
Corps flottants de Jane Sautière
Vu
Mon pays imaginaire de Patricio Guzmán
L'ombre de Goya par J-Claude Carrière de José Luiz Lopez-Linares
Vous les croisez souvent, ils sillonnent le centre-ville, un beau couple d'octogénaires à la démarche altière, lui, grand, enveloppé d'un loden l'hiver venu, un halo de cheveux blancs autour d'un beau visage marqué par le grand air, elle, toujours à son bras, jolie, délicate, carré poivre et sel impeccable et tirée à quatre épingles, vous le croisez aujourd'hui, il est seul, il s'appuie sur une canne
Une trottinette électrique fonce vers la place Clémenceau par la rue Joffre. Deux très jeunes filles à bord. A l'arrière, l'une, lumineuse, grande chevelure au vent, tient son amie bien serrée contre elle. On ne voit pas le visage de l'autre. Tchador flottant, elle s'accroche au guidon. Leurs éclats de rire.
Lu
Le silence même n'est plus à toi d'Aslı Erdoğan
Carnets de New York de Paolo Cognetti
Vu
théâtre
Blanche compagnie Hecho en casa
Lu
Ainsi nous leur faisons la guerre de Joseph Andras
Le Goût âpre des kakis de Zoyâ Pirzâd
Vu
cinéma
Le Pharaon, le Sauvage et la princesse de Michel Ocelot
Cantar o Morir. Wikarabo Wechiko Mukubo de Sylvie Marchand et Lelio Moehr
spectacle
Eléphant ou le temps suspendu de Bouchra Ouizguen
à Bayonne, dans le cadre de la programmation du festival Haizebegi, direction artistique Denis Laborde
-Musiques d'Afghanistan par l'Ensemble Orchestral de l'Institut National de Musique d'Afghanistan en exil au Portugal
suivi au pied levé de deux chants polyphoniques d'Uukraine par Myroslava Vertiuk, Natalia Khomenko, Olga Karapata, Sofia Andruschenko &Stepan Andruschenko du Musée Ivan Honchar, Kiev
- concert Kokoda, par Ilan Ilan avec Reno Henrys (chant), François Domergue (percussions) & Serge Tamas (guitare), groupe accompagné du claquettiste Fabien Ruiz, chorégraphe du film The Artist
- concert Le Bo vélo de Babel, récital Voc'alchimiste par André Minvielle
Fin de journée, ligne 38, celle qui relie Biarritz à Bayonne en longeant les plages, les Sables d'Or, les Corsaires, la Madrague, l'Océan, les Dunes, les Cavaliers, la Barre, un jeune homme s'apprête à descendre planche de surf bien calée sous le bras gauche. Dans la main droite, une canne qu'il hasarde dans les portes coulissantes, une canne blanche.
Lu
L'ode au chou sauté d'Inoué Areno
Sur la photo de Marie-Hélène Lafon
Vu
Maryrose et Rosemary d'Alexander Korda
Lettre d'une inconnue de Max Ophuls
Entendu
église de Gelos : Orchestre de Chambre de Toulouse et son directeur artistiques Gilles Colliard pour un programme présenté autour d'œuvres J.S Bach sur instruments d'époque
Spectacle de danse
Mystery Sonatas / for Rosa Anne Teresa De Keersmaeker sur des sonates de Heinrich Ignaz Franz Biber
c'est votre voisin de fauteuil, il a marché seul longtemps, un besoin de faire le point, il parle, parle, des réticences pourtant à évoquer son métier d'avant, puis alors qu'on est presque arrivé, J'étais dans les Pompes Funèbres, un hasard, j'ai cru que je tiendrais pas un mois, j'avais un petit bureau et quand je soulevais les feuilles je croyais sentir des odeurs, quarante ans que j'y ai passé, j'ai commencé à Lourdes, du boulot par-dessus la tête, on venait parfois vous chercher en pleine nuit, des gens venus d'ailleurs, jusqu'au bout ils avaient cru au miracle
Bientôt quatre-vingt-six ans. Elle a beaucoup maigri, l'ombre d'elle-même. Ne plus la croiser par les chemins. Ils lui on dit On ne trouve plus les pièces pour réparer la voiture. Elle est allée trouver le premier voisin, il lui a répondu la même chose. Elle est allée trouver le second voisin. "Heureusement que je l'ai su à temps", il lui a répondu la même chose. Une nuit, la belle-fille entend un léger bruit. Elle la trouve assise en haut des marches devant la porte de la maison qu'elle a construite avec son mari des années et de nombreux enfants plus tôt. -Mais qu'est-ce que vous faites là ? -J'attends le jour. Ils l'enferment.
Elle le remercie. Il avait raison, son supposé petit bout de coton dans l'oreille, pas de quoi fouetter un chat. Il sourit "S'il n'y a pas plus grave que ça. Comme on dit par chez moi, de temps en temps il faut remettre l'église au milieu du village."
Lu
Les invisibles de Roy Jacobsen
Béton de Thomas Bernhard
De l'art d'ennuyer en racontant ses voyages de Matthias Debureaux
Rosa Candida d'Auður Ava Ólafsdóttir
Avant les années terribles de Victor del Arbol
Vivre à ta lumière d'Abdellah Taïa
Vu
Les petites marguerites de Vera Chitilova
Lu
Journal de guerre d'Ingeborg Bachman
Sylvia Plath de Valérie Rouzeau
Mon désir le plus ardent de Pete Fromm
Une chaleur écrasante. A l'ombre d'un muret un tout jeune homme en chien de fusil. Deux trois grands livres en guise d'oreiller, il dort. Sur le sommet de la pile Attendre un enfant.
Lu
Hérétiques de Leonardo Padura
Le signal de Ron Carlson
Vu
au cinéma
Accatone de Pier Paolo Pasolini
Mamma Roma de Pier Paolo Pasolini
au Festival Citadelle en scène de Saint-Jean-Pied-de-Port
Les trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas, adapté par Charlotte Matzneff et Jean-Philippe Daguerre et mis en scène par Charlotte Matzneff
Le K de Dino Buzzati avec Grégori Baquet, adapté et mis en scène par Grégori Baquet et Xavier Jaillard
Dom Juan de Molière mis en scène par Jean-Philippe Daguerre
A l'étable, une vache en chaleur meugle. Passage de l'inséminateur. De retour des champs, à sa femme - Alors finalement, il a mis quoi, Jugnot ou Nadal ?
On se retourne sur son passage. Une beauté confondante. Dix-neuf ans. Conscience aigüe d'un point d'orgue ? A sa mère Tu me conseillerais quoi comme crème anti rides
Lu
L'Exception d'Auður Ava Ólafsdóttir
Daniel Stein, interprète de Ludmila Oulitskaïa
Le livre de Joe de Jonathan Tropper
Les locataires de l'été de Charles Simmons
Les femmes sont occupées de Samira el Ayachi
Vu
Cahiers noirs - Ronit de Shlomi Elkabetz
Bandits à Orgosolo de Vittorio de Seta
As Bestas de Rodrigo Sorogoyen
Lu
La France atomique de Daniel de Roulet
Partout le feu d'Hélène Laurain
L'Embellie d'Auður Ava Ólafsdóttir
Bélhazar de Jérôme Chantreau
Vu
Ciné
Ennio de Guiseppe Tornatorre
La nuit du 12 de Dominik Moll
Cahiers noirs 1 -Viviane de Shlomi Elkabetz
Spectacle
théâtre de verdure Kalika / Kimberose
Lu
La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr
Vu
Un ange à ma table de Jeanne Campion
Limbo de Ben Sharrock
Et J'aime à la fureur d'André Bonzel
French Cancan de Jean Renoir
Suis-moi je te fuis de Kôji Fukada
on n'en est plus, juste de passage, l'amie Je n'ai pas trouvé d'accompagnateur, tu pourrais me dépanner ? devrait surgir, ici ou là, retrouver un mobilier, les tables dites de travail, les casiers, les photocopies oubliées, les publicités, les tableaux de liège à l'accumulation de mots épinglés, les bruits, entrées sorties, brouhaha de voix, des rires, la sonnerie, comme un appel d'air soudain, la salle se vide, quelqu'un, la quarantaine, il se déplie à regret, traîne un peu, prend ses affaires, sourire désabusé, il quête votre regard, se décide enfin Allez, à la mine puis se ravisant Non quand même faut pas exagérer mais une telle lassitude dans son sourire
Lu
S'adapter Clara Dupont-Monod
Compagnie K de William Marc
La Géante Laurence Vilaine
Vu
Le jardin de Finzi-Contini de Vittorio de Sica Incipit Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez
Bien des années plus tard, face au peloton d'exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l'emmena faire connaissance avec la glace. Macondo était alors un village d'une vingtaine de maisons en glaise et en roseaux, construites au bord d'une rivière dont les eaux diaphanes roulaient sur un lit de pierres polies, blanches, énormes comme des oeufs préhistoriques. Le monde était si récent que beaucoup de choses n'avaient pas encore de nom et pour les mentionner, il fallait les montrer du doigt.
D'autres livres
Une lumière douce
Murs tapissés de tableaux et photos dont un très beau portrait d'homme, volutes de fumée, visage buriné, élégance du noir et blanc, Il venait ici, c'est un peintre connu, un de ses tableaux, attendez, je vais chercher son nom, Tim Berhens, un de ses tableaux est exposé à Madrid.
Deux femmes jouent aux petits chevaux. Il est neuf heures.