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on leur avait dit, il faut défricher, arracher les petites vignes, on vous donnera des subventions, ils avaient obéi,
on leur avait dit, il faut arrêter la brebis pour faire du lait, puis les quotas laitiers, une amertume, ils avaient obéi,
on leur avait dit, on va créer une grande coopérative, vos revenus seront assurés, tous les petits marchés de bestiaux étaient morts, fini les discussions autour du prix, le boire un coup au bistrot avant de rentrer, mardi à Hasparren, mercredi à Peyrehorade, vendredi à Saint-Palais, ils avaient obéi,
on leur avait dit, il faut améliorer les races, alors en avant insémination, éponges, veaux et agneaux étaient devenus plus gros, bienvenue aux césariennes, le vétérinaire un familier, "et quand tu l'appelles un dimanche, avec le prix que ça coûte, tu rattrapes jamais" les bêtes pressurées ne faisaient plus de vieux os, ils avaient obéi,
le Crédit Agricole avait prospéré, les tracteurs grossi, arrachées les vignes au côté de la maison, disparues haies et fougeraies à grands coups de bulldozer, les oiseaux allaient nicher on ne sait où,
une deux générations avaient passé,
ils avaient été les jeunes dans la longue chaîne des générations,
et ils étaient au seuil de la vieillesse, le corps déformé, porter des seaux, soulever des bottes de foin, forcément des traces, l'élevage, celui qui ne vous laisse pas un dimanche, ils avaient aimé mais en 40 ans une incitation et son contraire, les quotas, plus de quotas, le cochon, le kiwi, le lait de brebis, ne pas mettre tous les oeufs dans la même panier, la sagesse mais c'était quand même à perdre la tête,
ils étaient devenus experts en constitution de dossier, mendier une aide à un organisme ou un autre, on va quand même pas laisser perdre, ils savaient, avaient un comptable, tenir la paperasserie en ordre, les vaccins des bêtes, leur carnet et tout ça, valait mieux mais c'est pas ça qui vous fait un orgueil,
qui pour leur jeter la pierre, ils étaient restés, la terre empoisonnée, la viande aux hormones, manquerait plus qu'on leur fasse porter le chapeau, le paysage entretenu, des retraites de misère, se contenter, ils savaient, une propension à courber l'échine, mais l'amertume,
"il y a deux ou trois ans, je n'imaginais pas que je pourrais vivre sans brebis, si j'en gardais deux ou trois, je m'attacherais trop"
alors bientôt la ferme dirait juste qu'elle avait été
puis elle disparaîtrait
Ah oui c'est un texte juste et poignant sur la petite paysannerie...
RépondreSupprimertrès bien résumé, tout et son contraire et des vies de très dur labeur !
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