Lu
À travers les champs bleus de Claire Keegan
Air de solitude de Gustave Roux
« La nuit tombe très vite. Aimé part de bonne heure encore vers le champ de trèfle. Le soleil se couche dans un ciel si pur que l'instant est comme suspendu : on oublie le travail sournois de l'ombre. Et pourtant elle monte sans cesse, elle semble sourdre insensiblement de la terre et la noyer peu à peu, comme un marécage qui se gorge d'eau. On marche dans de la nuit, on enfonce lentement dans l'obscur. Le dernier trèfle tombe, c'est un peu de nuit qui croule dans de la nuit ; la faux est un sifflement invisible jusqu'à l'instant où Aimé la redresse et l'aiguise : une main de nuit caresse un pâle croissant d'acier contre le ciel. Les villages un à un s'étoilent, constellations humaines qui brûleront comme les autres jusqu'à l'aube.
Allons, il est temps de repartir vers nos lampes, de fouler à tâtons la rosée de glace et la prairie
- mais pendant que nous ne sommes encore qu'une voix et une voix, et deux taches à peine (qui sont nos visages), laisse que je dise une espèce d'adieu à ce qui vient de s'éteindre tout à fait, comme un bruit parmi les autres bruits du crépuscule et qui ne renaîtra plus cette année : ton dernier coup de faux. » (p 24, 35)
Vu
Les filles de Mai Zetterling
Il reste encore demain réalisé par Paola Cortellesi
Cet extrait est très beau. Voilà un auteur que je ne connaissais pas, je vais m'empresser de le lire. Merci.
RépondreSupprimer