Pour
ce vase comunicant, j'ai volé à Pascal Quignard ces
mots «Celui que nul ne voit et qui séjourne partout est
le temps» et j'ai proposé à Elise de partir de
là, du temps.
Je
me souviens de votre prénom Elise au tout début de mon
entrée dans Le petit journal de François Bon, je vous
lis comme une voleuse vole des choses simples et profondes, des
choses émouvantes, dans un lien fort avec ce qui vous entoure
la terre les gens, bienvenue dans le jardin sauvage.
***
Le temps invisible est partout et
chaque homme porte le temps invisible
Longtemps vous imaginez le temps
une maison noire aux murs infiltrés de poussières de lumière et,
un jour vous partez un peu plus
loin de ces murs de ces murs noirs de temps - un peu plus loin de d'habitude
- un peu plus loin de comme - un peu
plus loin de c'est -
Et vous marchez là ici là-bas
là-bas plus loin sur une route,
une route droite de jour une
route courbe de jour une route droite de
jour une route courbe de nuit une route droite de jour
une route brisée de jour une route droite de jour une route courbe de
jour une route brisée de nuit une route droite de jour une route droite de jour
une route droite de jour une route
droite de jour une route droite de jour un chemin de nuit
vous marchez,
les arbres nus se couvrent de
feuilles de fleurs de fruits et les
arbres nus redeviennent nus.
Vous vous arrêtez.
Vous levez la tête vous voyez le
ciel se couvrir de sombres sciures vous voyez une main tracer d'un geste précis la fin d'un cercle
double.
Votre corps éprouve la tristesse
du ciel.
Vous tournez maintenant sur un
cheval bleu et autour du cheval bleu des cris d'enfants et plus loin des corps
perdus dans une foule.
Plus tard vous croisez des géants
des danseuses des garde – barrières des voleurs des vendeurs des dealers des
comédiens, des souffleurs de verre, des musiciens, une sorcière s'approche du
miroir, vous refermez le livre,
et vous marchez.
Le temps invisible est partout et
chaque homme porte le temps invisible, un jour il est là devant vous il ne
porte pas de nom, vous apprenez le temps n'a pas de nom.
Vous entrez dans une pièce
blanche
Un homme avance vers une table
nue
Le corps de l'homme est droit
Vous regardez ses mains sur la
table nue
L'homme parle
L'homme dit le temps n'existe pas
La voix dit seul le temps
invisible existe
Puis
Silence
Noir
Vous marchez maintenant sur un
chemin de nuit.
Vous apprenez la première heure,
la première couleur le premier mouvement vous apprenez les choses profondes
mêlées à la vie, vous apprenez la pauvreté de la terre et la beauté du vent des
traces du vent sur les herbes les fleurs les arbres votre visage, vous apprenez
la beauté de l'empreinte d'un corps la fragilité du feu du souffle du mot brisé
vous apprenez à,
la terre bouge autour de vous et
le ciel et les étoiles et les éclairs les nuits d'été vous marchez maintenant
vous ignorez toutes les route parcourues, vous ignorez les mots pour dire
depuis quand vous marchez, vous ignorez les images perdues, vous fermez les
yeux tous les yeux de l'enfance et,
vous courrez vous courrez et
devant vous les arbres s'écartent et vous courrez dans le vent dans la pluie
dans le,
et sous vos pas tout s'efface les
bruits les décombres les combats acharnés les guerres les bruits du sang et de
la poussière, votre corps chute sur le chemin de nuit des milliers de grains de
sable griffent votre peau,
au-dessus de vous tout s'inscrit
dans les marques des nuages entre le
ciel et la terre, les extrémités de la ligne d'horizon,
Vous marchez maintenant dans la
realerrance.
***
Le Petit Journal de François Bon, notre trait-d'union initial, et Ana
une voix singulière pour dire la ville, la nuit, l'errance, les rêves
éveillés, une rencontre.
La phrase de Pascal Quignard « Celui que nul ne voit et qui séjourne partout est
le temps» proposée pour point de départ m'a accompagnée au cours de ces jours.
Merci Ana, de m'avoir invitée à ce vase communicant avec vous, bienvenue dans Même si...
Tiers Livre et Scriptopolis sont à l’initiative d’un projet de vases communicants
: le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à
charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations.
Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas
écrire pour, mais écrire chez l’autre.
Grand merci à Brigitte Célérier pour la liste des blogs participant aux “vases communicants” d'octobre.
Bien aimé votre chemin !
RépondreSupprimer@L_imature (jean christophe cros)